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Ouest-France - Sports
« Le retour à la compétition d’un extra-ordinaire »
Entretien avec Claire Carrier
dimanche 14 mars 2010
Schumi : un baron rouge devenu argenté

Retraite ou fin de carrière du sportif ?

Laure Manaudou, Marie-José Pérec sont sorties par la petite porte. Elles ont laissé une image de souffrance humaine justifiée. Ces grandes championnes sont des femmes très généreuses, très courageuses qui ont pris le risque de se sacrifier pour le rêve des autres. Ce ne sont pas des départs à la retraite, mais des fins de carrière. C’est différent de Mickaël Schumarer ou de Justine Hénin.

La place du champion

Les champions ont réussi quelque chose de rare : à l’instant de la compétition, faire coïncider leur propre aboutissement avec les résultats commandés par la société sportive. Cet exploit définit le champion. Depuis qu’il est tout petit, tout au long des entraînements, il s’y prépare avec un travail lent, dans l’ombre. La société le sélectionne ensuite, puis fait ses pronostics, investit sur lui etattend qu’il « concrétise ».

Le retour de Schumacher

Quand on arrête les entraînements intensifs, la mémoire du corps tourne à vide. C’est comme une excitation qui n’a plus de décharge. Il faut compenser par autre chose. Si on ne fait que du vélo pendant 10 ans, on ne peut pas reprendre la marche sans rééducation. Mickaël Shumacher a besoin de s’entraîner pour conserver son acuité visuelle efficace quand il roule à 300 km/h.

Un retour comme le sien peut se justifier par une sortie par la grande porte alors que le corps n’avait pas donné sa limite, pas seulement corporelle mais aussi intellectuelle. Le vide, qui existe chez n’importe quel individu à la retraite, le rend encore plus fragile. A l’inverse de la femme, l’homme n’a pas le sens de la protection, de ses compétences. La femme connaît la notion du temps grâce à son état physiologique.

Le challenge de « Schumi »

Le pilote allemand n’a rien à prouver sauf à ses sponsors qui vont lui demander de rester au top. Il a connu un manque dans sa vie quotidienne, une défaillance dans son retour à la vie normale. Il est un homme extra-ordinaire qui a déconnecté de sa dimension ordinaire. Il est devenu dépendant de cette dimension extra-ordinaire. Sa vie est happée par la reconnaissance du champion de Formule 1. Il est dans sa dynamique à lui. C’est son droit, mais c’est un manque d’humanité. Il passe à côté de beaucoup d’autres cordes à son arc. Il rejoint en cela Jeannie Longo : où est le plaisir, le désir de cette cycliste ? C’est beau et pathétique, même si elle n’a plus que cela dans sa vie.

L’échec est-il permis ?

Pour chacun, il l’est bien sûr, mais Schumacher risque de se l’interdire. Au risque de mourir en course ? Cependant, il peut saisir cette occasion de travailler sa fin de carrière. Il avait peut-être arrêté trop tôt, par nécessité de faire un break. Cela serait très sain et admirable surtout venant d’un très grand champion comme lui.

Mais il faut rappeler que pour ces sportifs professionnels l’investissement n’est pas la vie. Celle-ci est un cadeau de la nature, du hasard. Les parents transmettent la vie. Faire preuve d’humilité par rapport à elle témoigne de notre appartenance à l’humanité. Parfois, cette notion échappe à ces champions qui ont un devoir de performances, de résultats.

Recueillis par Didier CHEVALIER.

 

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